Glissement de terrain à Blatten : le bassin genevois est-il exposé à de tels risques ?
Un événement dramatique et révélateur
Le 28 mai 2025, le village suisse de Blatten, perché à plus de 1300 m d'altitude dans le canton du Valais, a été brutalement frappé par une coulée de débris issue d'un glissement de terrain glacio-torrentiel. Cette catastrophe naturelle, consécutive à l'effondrement d'une section du glacier du Birch, a entraîné une avalanche de glace, de boue et de roches qui a enseveli une partie du hameau. L'évacuation préventive des habitants a permis d'éviter une tragédie humaine plus lourde, bien qu'une personne soit toujours portée disparue.
Ce type d'événement met en jeu plusieurs processus physiques complexes : rupture de pergélisol, fonte glaciaire, surcharge hydrique du substrat rocheux, et libération brutale d'énergie gravitationnelle. Le glissement de terrain se distingue d'autres aléas par sa dynamique : il peut s'agir d'un lent affaissement ou d'une coulée ultrarapide. Dans le cas de Blatten, on parle d'un "flow slide" (coulée de débris), souvent amplifié par la topographie escarpée et les conditions climatiques extrêmes.
Quels risques dans le bassin genevois et la vallée de l'Arve ?
Le bassin genevois, bien que moins abrupt que le Haut-Valais, présente lui aussi des vulnérabilités géologiques. En Haute-Savoie, plusieurs types d'aléas naturels sont recensés :
Glissements de terrain : localisés dans certaines zones argileuses (marnes, molasses), comme sur des secteurs bien identifiés à Reignier-Ésery, Fillinges ou Bonneville. Il ne s’agit en aucun cas d’un risque généralisé sur l’ensemble des communes. Ces phénomènes concernent des terrains spécifiques où la nature du sol et la pente exigent une vigilance particulière. Lorsqu’ils sont mal drainés ou saturés en eau, ces sols peuvent se gonfler et perdre leur cohésion. En 2023, Fillinges a connu un glissement de terrain significatif, mais strictement circonscrit à un versant connu pour sa sensibilité géologique.
Inondations : l'Arve et ses affluents présentent un risque de crue, surtout en aval de la cluse de Bonneville. En 2000, une crue rapide a provoqué des dégâts significatifs sur les infrastructures.
Chutes de blocs : concernent surtout les secteurs montagneux (Salève, Voirons), mais aussi des falaises secondaires parfois proches de zones urbanisées.
Sismicité : la région est classée en zone de sismicité modérée à moyenne (niveau 4/5), avec plusieurs failles actives sous le Jura. Le séisme de 1996 à Evian (magnitude 5.3) a rappelé que le risque est réel.
Aléas climatiques croissants : intensification des cycles gel/dégel, pluies diluviennes, désaturation des sols... Autant de facteurs qui fragilisent les terrains et augmentent la fréquence des glissements.
Peut-on habiter sereinement dans une zone à risque ?
Oui, à condition de connaître et d'intégrer les risques dans son projet immobilier. Plusieurs outils techniques et juridiques sont à la disposition des professionnels et des particuliers :
Les Plans de Prévention des Risques Naturels (PPRN) identifient les zones rouges (inconstructibles), bleues (constructibles avec prescriptions) et blanches (sans aléa connu). Ces cartes sont opposables aux autorisations d'urbanisme.
Le site GeoRisques.gouv.fr permet à chacun de consulter les risques auxquels une parcelle est exposée (glissement, inondation, séisme, retrait-gonflement des argiles). Il suffit d'entrer l'adresse du bien ou son numéro de parcelle cadastrale pour visualiser l'ensemble des aléas connus à ce jour.
L'État des Risques (ancien ESRIS), obligatoire depuis 2023 dès la mise en annonce, informe tout acheteur ou locataire de l'exposition d'un bien. Il doit être annexé à tout compromis ou bail. Ce document peut être généré automatiquement sur GeoRisques ou demandé à l'agence immobilière en charge de la vente.
Les études géotechniques G1/G2 permettent d'analyser les caractéristiques mécaniques du sol, notamment pour les terrains à bâtir. Elles peuvent éviter des sinistres majeurs ou des surcoûts lors des travaux.
Le rôle du conseiller immobilier face aux aléas naturels
Dans ce contexte, mon travail en tant que négociateur immobilier ne se limite pas à estimer ou vendre un bien. Il consiste à accompagner chaque client avec un devoir de conseil renforcé, notamment sur :
La lecture des documents d'urbanisme et de prévention des risques,
La vérification des obligations de diagnostics et de transparence,
L’orientation vers des professionnels du sol (bureau d’études, assureurs, notaires) lorsque nécessaire,
La valorisation des terrains bien situés (bonne gestion des eaux, absence de contraintes majeures),
L’appréciation du risque dans une logique patrimoniale : un terrain en zone bleue, bien étudié, peut être une excellente opportunité, à condition d’en comprendre les contraintes.
Conclusion : s’informer pour mieux habiter
Le risque naturel fait partie de la vie en montagne et en zone préalpine. Il n'est pas à craindre, mais à connaître. L'information, la prévention, et l'accompagnement professionnel permettent de faire des choix sereins, responsables et pérennes. Dans un marché immobilier en constante évolution, ce sont aussi ces compétences techniques qui font la différence entre une transaction ordinaire et un projet réellement réussi.